Fleury & Bott : Librairie Magique

Le future étudiant de Poudlard ne prêta guère attention à l'attroupement qui s'était formé. Son regard se tourna plutôt vers cet homme à l'allure impeccable qui se démarqua du reste des visiteurs. Ce qui attira inconsciemment la sympathie du jeune garçon.
Héritier d'un milieu où les hommes ont ce type de prestance, il était habitué aux réunions mondaines auxquels ses parents participaient régulièrement. Il remarqua les traits d'une conversation pouvant être forte intéressante.
Il fit ainsi mine de ne pas voir l'homme à la rose, et dit au préfet :
"Je vais commencer par regarder les livres sur la finance des sorciers veux-tu venir avec moi? ".
Le rayon dédié était en effet situé derrière les deux hommes.

Malheureusement, Lother se trompait. L'homme à la rose discutant sur le comptoir du marchand, la seule chose qui pourrait éventuellement se trouver derrière serait l'arrière boutique.

_ " La...Finance...Sorcière ? " Répéta lentement Vincent comme si une telle terminologie lui était parfaitement étrangère. Il faut dire que les sorciers avaient tendance à reléguer cette activité aux gobelins et qu'il était assez rare que ces derniers dévoilent leurs secrets. Toutefois, un rayon parfaitement anecdotique semblait rassembler quelques ouvrages qui pourraient intéresser l'oeil pécunier du cadet.

_ " Hé bien... Je vais te laisser regarder cela seul... Personnellement, je préfère chercher quelques bouquins de métamorphose ! "

Sur ces bons mots, le préfet accorda un bref signe de main à Lother et monta à l'étage. En bas, la situation n'avait pas sensiblement évoluée.

Le jeune Hortinger était assez intrigué qu'un homme d'une telle carrure et qui plus est qu'il ne connaissait pas se trouve dans ce lieu. Sans doute une personne haut placée pensait-t-il.
Il s'empressa de prendre un livre sur la numismatique et fit mine de le feuilleter à proximité du comptoir tout ayant un oreille attentive.

Lother fit plutôt bonne pioche, puisque l'ouvrage qu'il venait d'emprunter traitait de l'évolution des taux de change entre galion et livre sterling et de l'impact économique des différents boums des monnaies moldus. Toutefois, ce n'était pas ce qui l'intéressait sur l'instant. En s'approchant, le jeune homme remarqua que l'homme en costume gesticulait au moins autant qu'il ne parlait, mais presque toujours avec une sophistication calculée et maniérée.

_ " Vertudieu ! Me voilà aussi prestement que singulièrement scandalisé ! " Lança le costumé qui tapota farouchement le comptoir. Le libraire, un petit rabougri à la calvitie grisonnante se frottait l'arrière de la tête sans trop se soucier de la scène qu'on lui faisait. " Je suis bien embêté..." Maugréa-t-il. " J'aurais pourtant juré que je l'avais ! "

_ " Ne jurez point mon bon monsieur ! "

Reprit l'homme à la rose en secouant un index ganté, comme s'il était en train de gronder un enfant. Le libraire lui jeta un regard médusé, puis se fendit d'une grimace qui témoigna de toute la lassitude que lui inspirait ce genre de marginaux.

_" Je pourrais contacter d'autre librairies, même à l'étranger si la barrière de la langue n'est pas un problème pour vous !"

Le ganté leva les deux mains au plafond puis s'exclama " Mais qu'ouïs je ? De la débrouillardise ! Voici une inestimable qualité ! "

La conversation continua encore quelques instants et, après que le libraire eut promis à son drôle de client de le contacter dès qu'il aura eu du nouveau, ce dernier prit le chemin de la sortie.

Le jeune Hortinger fut surpris d'une telle attitude de la part de la part d'un homme en apparence aussi distingué. Après tout, peut être que l'homme à la rose devait avoir ses raisons, les libraires ont souvent du retard à l'approche de la rentrée.
Il passa donc à travers la librairie et s'empara de tous les livres présents sur sa liste.
Puis il rejoint les bras remplis de bouquins, le préfet de la maison Serdaigle en espérant qu'il soit toujours autour de ces ouvrages consacrés à la métamorphose.

Rien d'autre de particulier n'arriva dans la boutique et, bientôt, l'endroit retrouva sa quiétude habituelle. Lother monta l'étage où se trouvaient les ouvrages de métamorphose et découvrit que Vincent, un livre flambant neuf sous le bras, discutait avec un autre garçon qui semblait avoir un âge similaire au sien. Ce dernier était très typé méditerranéen, beaucoup plus grand que son interlocuteur et avait un visage étonnamment long, mais qui inspirait une amabilité quasi compulsive. En montant à l'étage, Lother put entendre quelques bribes de conversation entre les deux.

_ " Je te le jure ! J'ai appris en même temps que toi que Slughorn prenait sa retraite ! "

Vincent fronça les sourcils et posa un poing contre ses hanches.

_ " Ce n'est pas très sérieux." Maugréa ce dernier. " Comment puis-je prendre de l'avance si je ne connais même pas le CV ou les préférences de mon futur prof' ? Mais je pensais que tu saurais quelque chose toi au moins, Shafiq ..."

Ni Vincent ni son interlocuteur n'avaient remarqué que Lother était de retour à l'étage. Libre à lui de manifester sa présence.

Lother Hortinger ne prêtait que peu d'attention à la conversation jusqu'au moment où il entendit les noms de Slughorn et Shafiq.
Lother avait en effet entendu parlé du célèbre professeur de potion et ancien directeur de la maison Serpentard. De nombreux membres de sa famille ont eu ce privilège d'être sous sa direction ! Imaginant l'âgé avancé de ce dernier, Lother fut à moitié surpris d'entendre pareil nouvelle, mais était cependant déçu que ce doute soit confirmé. Après tout qui pourrait être à la hauteur des professeurs Rogue et Slughorn.
Mais le nom Shafiq attira encore davantage l'attention du jeune homme. Sa famille avait eu l'occasion de rencontrer des membres de la famille Shafiq. Son père avait conseillé quelques uns d'entre eux sur leurs placements financiers. Pourtant, il ne connaissait pas ce garçon.
Pressé de faire sa connaissance, tout souhaitant paraître le moins opportun possible, il se dirigea vers les deux jeunes hommes un léger sourire aux lèvres et les yeux mi-clos.

Une fois vu de prêt, Shafiq était encore plus grand qu'il n'y paraissait. Vincent paraissait minuscule à ses côtés et l'allure déginguandée du sang-pur couplé au sourire aimable qu'il avait gravé sur ses lèvres lui donnaient des allures de gentil géant.

_ " Disons que je sais ce que je suis supposé savoir. " Confessa le sang-pur avec une certaine malice. " Tout ce que je peux te dire, c'est que le nouveau professeur sera le plus jeune directeur de maison de tous les temps. Pour le reste... Disons que sa seule présence risque de pimenter nos années scolaires. "

Vincent posa la paume de sa main contre la joue et se la malaxa fébrilement quelques instants tout en maudissant intèrieurement le manque de fairplay du préfet de Serpentard. Il faut dire qu'en dépit de l'entente cordiale qui règne entre les deux, Shafiq avait multiplié les coup-bas pour que sa maison remporte la coupe des maisons.

_ " Mieux que rien, je suppose..." Vincent détourna son regard de celui de son interlocuteur et remarqua le retour de Lother. " Ah le voilà ! Magnus, je te présente le futur première année que j'ai rencontré pendant l'altercation dont je te parlais. Lother Hortinger, voici Magnus Shafiq, préfet de Serpentard."

Shafiq observa le nouvel arrivant avec cette tranquille curiosité qui le caractérisait tant et s'affranchit d'un nouveau sourire.

_ " Hortinger... Hortinger... Voilà un nom qui me parle. " Remarqua Magnus d'un enthousiasme très maîtrisé tandis qu'il tendait une énorme main vers Lother. Le préfet était enfoui dans une veste de costume marron qui le vieillissait plus que de raison et cernait ses très larges épaules tout en redressant légèrement son allure maussade. " Comment se porte ta famille ? "

Lother s'empara avec enthousiasme de la main du préfet de Serpentard, le tout en gardant sa droiture et sa rigueur physique. Derrière cette apparence austère se cacha en réalité une fierté et un sentiment de réconfort qu'il arrivait à cacher.
Fixant Magnus Shafiq du regard il lança :
" Enchanté de faire votre connaissance. Peut être mon nom vous est familier du fait de mon père Marcus Hortinger, qui a eu l'honneur sinon le privilège de conseiller à quelques reprises votre famille."
Puis lâchant la main de Magnus, il se mit au milieu des deux préfets, et dit d'un ton léger et amusé :
"le hasard fait bien les choses, deux préfets qui plus est de deux maisons très singulières en une journée, cette journée ne pouvait être que plus sympathique !"
Puis revenant sur la question du grand garçon il reprit:
"ma famille se porte bien, merci à vous ! Beaucoup d'affaires en perspective donc pas mal de travail! Qu'en est-il de la votre?"
Lother bouillonnait de question non seulement par rapport au jeune Shafiq et sa famille, mais aussi sur la vie à Serpentard, et également sur ce qu'il venait d'entendre. Mais il se garda de les poser de peur d'embêter les deux jeunes garçons.

Vincent gloussa, il comprenait désormais un peu mieux la curieuse attitude de Lother et son drôle d'intérêt pour tout ce qui touchait à la finance. Moldumancien convaincu, il voyait d'un assez mauvais oeil le conservatisme porté par les familles "sacrées", mais Shafiq n'était pas vraiment de cette race-là. Cette famille avait été, un peu à la manière des Flint, une famille obombrée par les "grands" suprémacistes du siècle dernier : Les Black, les Lestrange et les Malefoy. Toutefois, contrairement aux Flint, les Shafiq avaient conservé une certaine modestie dont ils se contentaient très bien et ne participaient à la vie des sang-pur qu'à travers leur présence et leur bonhommie permanente lors de soirées mondaines et de mariages. Ils faisaient de leur mieux pour conserver au moins un héritier de sang-pur par génération, mais ne faisaient pas grand état du reste ce qui leur permettait, en outre, de s'adapter au reste du monde.

_ " Oh c'est bien possible. " Siffla Magnus avec amusement. " Mon père n'a jamais été très doué pour toutes ces choses-là. C'est un historien, certains de Ses livres sont encore en vente ici si je ne dis pas de bêtises. "

Le grand préfet laissa son regard balayer les étagères quelques instants puis revint vers Lother.

_ " En réalité ce n'est pas tout à fait un hasard ! "

Reprit Vincent avec ataraxie.

_ " Oui", compléta Magnus : " Vincent est un rat de bibliothèque invétéré, il a passé tout son été ici. Quant à moi, j'ai un rendez-vous important avec l'apothicaire Bugslow dans peu de temps. J'aimerais qu'il me fournisse en ingrédients divers et variés afin de rouvrir le club de potions de Poudlard. "

Vincent opina puis continua la réponse de son confrère. " Les clubs sont devenus l'une des pierre angulaire de la vie à Poudlard. De véritables outils de perfectionnement reconnus par l'école ET le ministère ! A la rentrée, seul celui de moldumancie et de duels, géré par miss Leger, seront ouverts. Si Magnus ici présent parvient à ouvrir le sien, alors toute l'école en bénéficiera et le nombre de matières que nous couvrirons nous permettra quelques invités de marque ! "

Vincent jubilait à cette idée. Il rêvait d'avoir l'opportunité d'inviter Sir Maxence en personne à Poudlard ! Quelle gloire ce serait. Magnus semblait tout aussi enthousiaste que son camarade, mais demeurait beaucoup plus réservé ; Il se contentait de fixer ses deux interlocuteurs avec un sourire attendri ; Presque paternel.

_ " Tu peux me tutoyer. " Répondit finalement le sacré à Lother avant de poursuivre : " Oh tu sais, les Shafiq absorbent les saisons comme un recurvite le ferait du fond d'un chaudron. Le jour où il faudra s'inquiéter pour nous, c'est que le monde ira très mal. " Et c'était le cas de le dire car, en dehors de quelques soucis quotidiens, les Shafiq pouvaient se targuer d'avoir rempli leur devoir citoyen pendant plusieurs siècles consécutifs. Aucun d'entre eux n'a jamais fini à Azkaban, aucun d'entre eux n'a jamais rejoint Grindelwald et encore moins Voldemort. Ils se contentaient de leurs petites affaires tout en veillant à ne jamais se faire mouiller par la folie des temps présents.

Lother avait vaguement entendu parler des clubs de Poudlard, mais venait de connaître leur importance grâce à l'exposé des deux préfets.
Il fut d'autant plus surpris par la simplicité du jeune Shafiq, simplicité qui était commune à de plus en plus de sorciers au sang-pur.
"Je ne sais pas si vous comptiez rester ensemble, mais si tel est le cas je peux vous accompagner tous les deux chez Bugslow, ce sera l'occasion d'en savoir davantage sur es potions".
Le jeune Lother ne savait réellement pas quoi dire à Vincent dont l'enthousiasme pour la modulmancie le laissé perplexe de part sa méconnaissance, et son manque d'intérêt pour le sujet. Puis ne voulant pas décevoir Vincent qu'il trouvait fort sympathique ajouta : "et peut être en profiter pour savoir quelles potions sont privilégiées par les moldus"

Vincent chassa la proposition de Lother d'un las geste de main.

_ " Oh pour ma part, le plus loin je me tiens de cette boutique le mieux je me porte. Bugslow est un prétentieux indécrottable. " Et il était convaincu que c'était un charlatan, mais il n'osait pas le dire devant Shafiq.

Ce dernier, réajusta sa veste et prit un air très protocolaire qui lui allait étonnamment bien.

_ " Les moldus ne font pas de potions. Ils n'en sont pas capable. Tu l'apprendras dès tes premiers cours, mais en réalité la magie permet de créer des transformations chimiques qui sont considérées comme étant impossible ou même contre-nature par les moldus. On appelle cela des transformations magiques, tout simplement. "

Un pauvre coup de baguette magique pouvait remplacer des tonnes d'équipements de pointe. S'il y avait bien un domaine où la magie dominera toujours, c'était bien les potions. Cela expliquait sans doute pourquoi tant de sang-purs adoraient cette discipline.

_ " Enfin... Je crains de devoir confirmer les propos de Vincent. Bugslow est un vantard, mais il a de quoi le justifier... La grand-mère d'Aaron Flint, Agatha l'actuelle doyenne des sorciers, a été sauvée de la dragoncelle il y a une dizaine d'années et c'est à lui que nous devons le remède. Bien entendu, la vieille en a parlé à tous ses "amis" et la popularité de la boutique est montée en flèches alors que ce n'était jusqu'à présent qu'une étable sans réelle ambitions."

Chez les sacrés, le personnage d'Agatha était sujet à débat. Il était de notoriété publique qu'Aaron Flint haïssait sa grand-mère, mais personne ne savait trop pourquoi. Ancienne "matriarche" de la famille, elle se faisait, malgré elle, l'incarnation d'une époque que beaucoup souhaitaient oublier.